Post de Raphaël : Cérémonie du thé
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Allez, avant d’aller me pieuter, je comble un peu le retard sur mes rédactions et vais vous parler succinctement de la cérémonie du thé. Tout d’abord nous nous rendons dans un luxueux hôtel de Tokyo, au xème étage (x est une inconnue, pas le dix en chiffre romain…) et là surprise, on se croirait dans un ryukan traditionnel. Un jardin très élaboré, inspiré par le poème qui régit l’atmosphère de cet appartement aménagé et qui figure dans une sorte d’antichambre dont je ferai mention plus tard.
La cérémonie du thé ne porte pas ce nom pour rien. Instaurée par les samourais de l’ancienne époque, elle comporte un ensemble d’étapes régies par des règles de courtoisie très strictes, terriblement pompeuses auxquelles mon éducation occidentale m’a sans doute imperméabilisé.
A la base il s’agissait donc d’un cérémonial huppé, plutôt réservé à la haute société, donc rien d’étonnant à ce que tout dans cette simagrée soit si exagéré, si surfait. Pardon, je m’aperçois après relecture que mon discours est un brin orienté, je vais tenter de retourner dans une vision plus objective, plus factuelle. Mais vous me connaissez, je vous donnerai mon avis de toutes façons ;-)
Tout d’abord, on se purifie les mains. D’abord la gauche, puis la droite (en faisant couler l’eau suffisamment loin de la source pour ne pas la souiller), puis la bouche, mais l’eau ne devant pas être bue, on la recrache le plus discrètement possible dans la main gauche et dans un même mouvement fluide, secouer sa main gauche pour libérer l’eau recrachée. Le peu d’eau restant dans la louche en bois (j’en ignore l’appellation exacte et contrôlée) est reversée sur les mains en la mettant à la verticale, avant de reposer ladite louche sur le bord de la source.
Ensuite, on s’asseoit sagement dans le salon pendant que l’hôte prépare le thé. Nous sommes 8 en tout, donc la dame qui nous reçoit ne le fait que pour un (moi en l’occurence) pour nous montrer comment cela doit se passer, tandis que son acolyte dans l’arrière chambre du salon le prépare pour tous les autres en version accélérée. Je dis accéléré car la dame d’un âge respectable prend son temps, chaque geste semble mesuré, précis, soutenu. C’est hypnotique au début, on m’a tellement parlé de cette cérémonie…Mais sur la fin, on tire vraiment sur le pénible, on a plus que l’envie qu’elle nous serve son thé et qu’on le boive.
Juste avant, pardon pour l’ellipse narrative, je me rends compte que j’ai oblitéré la dégustation des friandises. On nous sert une pâtisserie à base de pâte de riz, parfumée à la pèche. Très sucré, terriblement délicieux. Sa digestion aide à patienter pendant la préparation du thé en fait ;-)
Enfin on me présente la tasse de thé. On me la tends, je dois demander la permission à mon voisin pour boire, après avoir remercié celle qui me tend la tasse. Je dois la tourner en sens contraire des aiguilles d’une montre avant de la boire, et lorsqu’elle est finie la retourner pour la remettre dans sa position d’origine. Après chaque gorgée il est de bon aloi d’admirer la tasse. Sous tous ses angles. Précision, les politesses d’usage mises à part, on ne parle pas pendant une cérémonie du thé. On profite juste de l’instant présent, du calme, de la présence de son hôte, de la saveur du thé (pour information, il est âcre et amer, plutôt salé), et de la vue sur le jardin zen, en réfléchissant à ce qu’il vous inspire.
Enfin on passe dans une petite pièce, et là on peut à loisir (parce que de toutes façons il n’y a rien d’autre à faire) réfléchir sur le thème du poème en kanji écrit sur un rouleau présenté au fond de la pièce. Ce poème, en français nous le désignerions plutôt par le terme « axe de réflexion philosophique », car il s’agit souvent, bien que sa tournure ne soit pas littéralement interrogative, d’une phrase que vous fait réfléchir à un thème particulier.
Au total, une cérémonie du thé peut durer de 3 à 5 heures. Sans parler. Juste à déguster du thé, regarder son hôte le préparer, admirer un jardin, une tasse, la tourner dans un sens puis dans l’autre, et réfléchir au sens de son existence. Ca faisait longtemps que je ne suis pas si content d’être un gaijin occidental !
Bloggestement vôtre,
Raphaël.
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